Un saut en avant pour sortir du gaz russe, pas encore des énergies fossiles
L’horreur de la guerre en Ukraine a fait prendre conscience aux Européens de la nécessité de se passer des hydrocarbures russes, en cherchant à renforcer très rapidement leur indépendance énergétique. C’est l’ambition du plan d’action (baptisé « RePowerEU ») présenté hier par la Commission européenne. Si celui-ci propose des mesures fortes en matière de transition énergétique, il comporte aussi des éléments inquiétants qui pourraient peser sur nos objectifs climatiques.
Du côté positif, la Commission propose trois mesures qui, jusqu’il y a peu, auraient été inespérées pour les défenseurs du climat. La première consiste à rehausser l'objectif d’énergies propres dans le mix énergétique de l’UE de 40 à 45% d’ici 2030 (contre 22 % aujourd’hui). La seconde vise à faire passer l'objectif d'efficacité énergétique de 9 à 13%, afin de donner un coup d’accélérateur aux mesures pouvant réduire notre consommation d’énergie en Europe (telles que la rénovation énergétique des bâtiments). Enfin, la Commission frappe un grand coup en faveur du déploiement de systèmes solaires photovoltaïques sur toit. Plus précisément, elle propose une obligation légale d'installer des panneaux solaires sur les toits des nouveaux bâtiments d'ici 2026 et sur les bâtiments existants d'ici 2029 : une mesure qui permettrait de produire une quantité d’énergie équivalente à plus de 321 pétroliers de gaz naturel liquéfié (GNL)!
Mais il y a quand même un hic de taille dans le plan d’action de la Commission, à savoir : la possibilité laissée aux gouvernements européens de continuer à financer des infrastructures énergétiques fossiles, allant de la remise en service de mines de charbon à la construction de pipelines et de terminaux méthaniers. Or, l'Agence Internationale de l'Énergie (AIE) et l’ONU ne cessent de le répéter : si nous voulons limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, nous devons renoncer dès à présent à tout nouveau projet fossile. Autrement dit, la crise énergétique actuelle ne pourra pas se résoudre aux dépens de la crise climatique.
Comment dès lors diversifier à court terme nos sources d’approvisionnement en gaz, sans investir dans de nouvelles infrastructures fossiles, tout en accélérant la transition vers les énergies renouvelables ? Tel est le périlleux exercice d’équilibriste auquel les dirigeants européens vont devoir se livrer dans les prochains mois.