Les candidat.e.s aux postes de commissaire européen sont-ils intègres ?
Les candidat.e.s aux postes de commissaire européen sont-ils intègres ? Sont-ils libres de tout conflit d’intérêts ? Et quid de leur engagement dans la lutte contre le changement climatique et les inégalités sociales ?
Voilà des questions cruciales qui occuperont mes journées ainsi que celles de mes collègues écologistes durant les deux prochaines semaines.
En tant qu’eurodéputé.e, nous n’exerçons pas seulement un pouvoir législatif. Nous jouons également un rôle de contrôle et de surveillance démocratique. La socialiste roumaine Rovana Plumb et l’ancien ministre de la Justice hongrois Laszlo Trocsanyi l’ont d’ailleurs appris à leurs dépens : avant même qu’ils aient passé leur audition, leur procédure de nomination a été bloquée par la Commission des Affaires juridiques du Parlement. Pour quels motifs? La première est dans le viseur du Parlement pour deux prêts litigieux. Quant au second, il n’a pas convaincu sur ses liens avec le cabinet d’avocat qu’il a fondé il y a une trentaine d’années.
Mais d’autres candidat.e.s commissaires sont dans le collimateur du Parlement.
Il y a tout d’abord la Française Sylvie Goulard (LREM, Renouveler l’Europe) : ses rapports avec le think tank fondé par le « financier vautour » Nicolas Berggruen sont sources de vives inquiétudes. De fin 2013 à fin 2016, alors qu’elle était eurodéputée, Mme Goulard a perçu du « Berggruen Institute » un salaire mensuel de 13 000 euros brut, soit un total de 350 000 euros sur la période concernée. Selon le quotidien Libération, sur vingt-sept mois, le travail rédactionnel de Sylvie Goulard pour l’Institut Berggruen se limiterait à deux notes d’une quinzaine de pages chacune. Et, selon la direction de l’Institut Berggruen, « à la participation à l’organisation » d’un town hall meeting à Madrid, « d’une table ronde à Bruxelles et de plusieurs autres réunions ».
Cela fait cher payé pour quelques réunions de travail. Même Stéphane Moreau et Yvan Mayeur auraient du mal à faire mieux
Mais ce n’est pas tout : l’ONG Corporate Europe Observatory rappelle également que Mme Goulard, lorsqu’elle était encore eurodéputée, a régulièrement pris part à des voyages payés par des lobbies. Ce fut le cas, par exemple, d’un déplacement financé par Barclays destiné à rencontrer des investisseurs de la banque britannique.
Les cas du socialiste espagnol Josep Borrell et du conservateur autrichien Johannes Hahn sont également interpellants. Tous deux détiennent des participations dans des entreprises multinationales inscrites au registre européen des lobbies. Afin d’éviter tout risque de conflit d’intérêts potentiels, ces derniers devraient suivre l’exemple de leurs consœurs Elisa Ferreira (candidate portugaise) et Stella Kyriakides (candidate chypriote), qui ont toutes deux décidé de vendre les actions qu’elles détenaient dans des entreprises. Au minimum, Messieurs Borrell et Hahn devraient placer tous leurs actifs financiers dans une fiducie sans droit de regard. Comment croire sinon en la sincérité de leur engagement en faveur du climat et de la défense de l'intérêt général?
Les eurodéputé.e.s ne disposent néanmoins pas de toutes les informations nécessaires pour évaluer les connexions existences ou présumées avec le secteur privé. Le media EUObserver a par exemple révélé que, parmi les déclarations d'intérêt remises par des candidat.e.s commissaires, quatre d’entre elles étaient presque vides. D’autres semblaient également contredire des déclarations publiées précédemment.
Ces obstacles auxquels font actuellement face les eurodéputé.e.s dans leur mission de contrôle démocratique démontrent l’urgence d’établir un comité d'éthique indépendant qui disposerait des ressources nécessaires pour examiner minutieusement les futurs candidat.e.s aux postes de commissaire européen.
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