Un nouveau scandale des produits chimiques avec la complicité des Etats
En décembre 2018, je m'offusquais d'un vote intervenu en session plénière et qui remettait en cause le principe de précaution. Un amendement discret au programme de recherche de l'UE introduisait un "principe d'innovation" qui en affaiblissait la portée. Cet amendement émanait du lobby de l'industrie chimique et était relayé et soutenu par les eurodéputés libéraux et conservateurs.
Aujourd'hui, l'Echo publie un article annonçant un "dieselgate" avec les produits chimiques. Ce scandale révélerait des dysfonctionnements et un non-respect du règlement REACH. Celui-ci, décrié par les multinationales de la chimie, fut adopté il y a plus de 10 ans pour éviter que des substances toxiques ou dangereuses pour la santé des humains ou des animaux ne soient mises sur le marché. Or, le régulateur supervisant la mise en oeuvre de REACH rapporte que 71 % des substances chimiques fabriquées en Europe présentent des lacunes en matière de tests ou d'informations sur leur dangerosité éventuelle au point que le patron de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) se déclare "très inquiet".
Comme dans le cas du dieselgate, il semblerait que ce soit le laxisme des Etats membres qui permette aux entreprises du secteur de se sentir libre de ne pas respecter les obligations prescrites par REACH. Parmi les entreprises pointées du doigt, on en trouve 33 actives en Belgique. On connait le poids du secteur de la chimie en Belgique et le soutien que lui accordent les gouvernements. Les failles pointées par l'ECHA devraient donc amener ceux-ci à s'expliquer sur les moyens déployés pour veiller à la bonne application de REACH et comment il se fait qu'autant d'entreprises belges soient identifiées.
Et si ceci est vrai pour les produits chimiques fabriqués en Europe, que faut-il imaginer au sujet de ceux qui sont importés, quand on connaît les faiblesses structurelles de nous services de contrôle douaniers.
Ceci m'amène à une triple conclusion : la première est qu'il faut absolument changer de modèle économique, imposer plus de transparence et du côté des Etats, s'assurer qu'ils fassent respecter les règles protégeant leurs populations et la Planète; la seconde est que ce type de scandale montre à nouveau à quel point les niveaux européen et nationaux sont imbriqués, d'où l'importance de considérer que les élections européennes, fédérales et régionales sont aussi cruciales l'une que l'autre. Enfin, tout ceci plaide pour un changement de logiciel et de système à tous les niveaux : qui peut imaginer qu'il interviendra si les forces politiques qui ont jusqu'ici porté ce système restent seules aux manettes?
Si presque toutes parlent aujourd'hui d'écologie, c'est souvent par opportunisme électoral. Si je ne doute pas de la sincérité de certain-e-s candidat-e-s, authentiquement convaincus de l'urgence écologique et/ou sociale, ils-elles demeurent minoritaires dans leurs familles politiques respectives. Sans les Ecologistes à bord, qui peut croire que nous gouvernements abandonneront la mondialisation néolibérale au profit de la transition écologique et solidaire?