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Dublin, un système dans l'impasse à réformer absolument

10/02/2018
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En janvier dernier, j'ai eu la chance d'accueillir au Parlement européen un groupe de jeunes réfugiés et demandeurs d'asile, venus raconter leur histoire à des eurodéputés et au Commissaire européen à la migration. Des récits poignants et dans lesquels est revenue à plusieurs reprise la question de "Dublin" qui place les gens dans des situations kafkaïennes. Le règlement de Dublin, c'est ce système qui prévoit les critères déterminant l'État-Membre responsable de la prise en charge d'une demande d'asile. Dans le système actuellement en vigueur, le critère qui prévaut dans l’immense majorité des cas est un critère géographique, à savoir : le pays par lequel le demandeur d’asile est arrivé en Europe est responsable de sa demande d’asile.

C'est à l'évidence un système très injuste, à la fois vis-à-vis des États-Membres tels que l'Italie ou la Grèce qui, vu la configuration de l'Union européenne, sont responsables du traitement de bien plus de dossiers que d'autres pays plus centraux, mais aussi pour les demandeurs d'asile : ce système arbitraire ne leur laisse pas de possibilité de choisir dans quel pays ils déposent une demande, alors même que leurs chances d'obtenir l'asile peuvent fortement varier d'un pays à l'autre. Et comme nos invités Kobani et Anthony nous l'ont expliqué, dans de nombreux cas non seulement les empreintes digitales sont prélevées sous la contrainte, mais elles sont en outre réputées valoir dépôt d'une demande d'asile, alors que cette démarche devrait être volontaire et qu'ils n'ont pas été prévenus des conséquences de cette opération sur leur dossier d'asile.

Nous avons hélas appris avec désarroi et colère que Kobani, l'un de nos intervenants lors de la rencontre que vous pouvez entendre ci-dessous dans la vidéo, a entretemps reçu son arrêté de transfert vers l'Italie ; un exemple de plus qui montre qu'il est grand temps de sortir de ce système aberrant. Le Parlement européen a adopté en novembre une position très ambitieuse en faveur d'un système plus juste et plus solidaire, établissant un mécanisme de relocalisation permanent pour une meilleure répartition des efforts entre les États-Membres et permettant de prendre en compte les liens que peuvent avoir les demandeurs d'asile avec un pays en particulier. On attend maintenant une position du Conseil, annoncée au plus tôt pour... juin 2018, mais nous savons que certains des États-Membres font preuve d'une énorme mauvaise volonté dès qu'il s'agit d'introduire un minimum de solidarité ; rappelons-nous qu'il a fallu de nombreuses réunions du Conseil pour s'accorder sur un maigre plan de relocalisation visant 160.000 personnes et qui est à ce jour loin d'avoir été mis en œuvre de façon satisfaisante.

Soulignons encore le jeu hypocrite joué par le gouvernement belge dans ce contexte : il n'a de cesse de reprocher à de nombreux migrants du parc Maximilien de "ne même pas vouloir demander l'asile chez nous" – "Demandez l'asile !" dit Charles Michel aux migrants - alors même qu'il sait très bien que nombre d'entre eux tombent sous le coup du système de Dublin et, s'ils entrent une demande en Belgique, risquent d'être renvoyés vers l'Italie où leurs empreintes ont été enregistrées. Si le gouvernement belge s'engageait, ce qui est sa prérogative, à suspendre les renvois "Dublin" et à ce que les dossiers rentrés en Belgique soient instruits en Belgique, nous verrions peut-être augmenter le nombre de demandes déposées chez nous...

Pour poursuivre la discussion, rejoignez-moi ici-même le vendredi 23 février à 12h30 pour une discussion en Facebook live sur les enjeux migratoires !

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