Bruxelles, le 6 novembre 2017
L’évasion fiscale constitue l’un des fléaux majeurs de ce 21ème siècle. C’est ce que vient à nouveau de nous rappeler le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), avec la divulgation des « Paradise Papers ». Il faut s’en réjouir car, en matière de lutte contre l'évasion fiscale, nous savons d'expérience que nos gouvernements ne s'écartent malheureusement jamais du principe suivant : sans pression, pas d'action. Leur appétit législatif dans ce domaine est proportionnel au niveau d'alerte médiatique.
Il est encore trop tôt pour évaluer l’étendue de ces nouvelles révélations et leurs implications politiques. Mais, deux observations peuvent déjà être faîtes de ce scandale fiscal.
Premièrement, les « Paradise Papers » mettent à nouveau en lumière le rôle déterminant joué par les intermédiaires financiers dans le business de l’évasion fiscale. Un nom revient en effet régulièrement dans les millions de documents épluchés par l’ICIJ: Appleby. Cabinet d'avocats basé aux Bermudes, il fait partie de ce qu’on surnomme le « cercle magique offshore », la crème du conseil juridique offshore au niveau planétaire.
Deuxièmement, les « Paradise Papers » confirment le rôle central que jouent le Royaume-Uni et ses territoires d'outre-mer dans les stratégies de planification fiscale agressives mises en place par les entreprises multinationales et les individus fortunés. Sans surprise, le gouvernement britannique bloque actuellement tout progrès au niveau européen concernant l’adoption d’une liste noire des paradis fiscaux. Il tente d’empêcher que les pays présentant un taux d'imposition des sociétés proche de zéro soient « blacklistés ». Ceci étant, les Etats membres disposent depuis le vote du Brexit d’un levier de poids pour faire plier leur partenaire britannique dans ce domaine : si ce dernier désire bénéficier dans le futur de relations commerciales privilégiées avec l’Union européenne, il lui faudra mettre un terme à ce business scandaleux de l’évasion fiscal.
Deux leçons cruciales à tirer de ce nouveau scandale: d’une part, la nécessité de contrôler strictement les activités des intermédiaires financiers et, d’autre part, l’urgence d’adopter une liste européenne des paradis fiscaux. Deux recommandations qui figurent précisément dans le rapport de la Commission d’enquête sur les « Panama Papers » qui sera soumis au vote final des eurodéputés en décembre. La bataille est encore loin d’être gagnée, mais c'est plus que jamais le moment de mettre la pression !