L'agriculture au carrefour des crises: zoom sur la réforme de la PAC 2013
Réforme de la PAC 2013: Regard critique sur les propositions de la Commission
Si l'agriculture ne représente qu'un faible pourcentage du PIB de l'UE, elle fournit néanmoins de l'emploi à près de 40 millions de citoyens européens[1] et couvre plus de la moitié du territoire de l'UE[2], ce qui la place au rang de principale gestionnaire de nos ressources naturelles. Par ailleurs, l'agriculture revêt une importance cruciale pour la vitalité de nos zones rurales et joue un rôle social majeur en matière de santé publique. Enfin, c'est elle qui répond à l'un de nos besoins humains les plus fondamentaux – l’alimentation. Pour toutes ces raisons, et parce que le modèle agricole dominant nous conduit droit dans le mur, les enjeux liés à la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC) en 2013 sont colossaux. Cette réforme nous donne l'opportunité d'inverser la tendance et de changer de cap comme en appelle José Bové dans son dernier ouvrage[3].
La réforme de la PACse dessine parallèlement aux négociations sur le budget de l'UE pour la prochaine période financière, 2014-2020. Cette concordance de calendrier n'est pas une coïncidence; le premier débat étant hautement conditionné par le second. En effet, qui dit remaniement budgétaire, dit opportunité de rebattre les cartes d'une politique que l'on critique souvent pour son conservatisme et sa "dépendance au sentier"[1]. Opérer une "grande" réforme dela PAC (par opposition à certaines réformes à mi-chemin d'une période financière, comme le bilan de santé en 2008) en même temps que la redéfinition de son budget n'est donc pas un hasard.
La pression budgétaire est identifiée par les spécialistes des politiques publiques comme un moteur de changement, pouvant provoquer des réformes substantielles. Ceci est d'autant plus vrai pour la PACqui représente encore aujourd'hui près de 40% du budget total de la l'UE. Une part budgétaire qui, en plein contexte d'austérité, est de plus en plus difficile à justifier aux yeux du contribuable. Malgré la forte promiscuité entre ces deux débats, la dimension budgétaire n'est pas la seule à conditionner la réforme de la PAC. D'autresfacteurs institutionnels, politiques et socio-économiques en influencent également la portée. Parmi les plus importants on notera: l'extension de la co-décision[2] àla PAC, la participation des 12 nouveaux Etats Membres à la réforme, l'envolée des prix des denrées alimentaires, la demande croissante en provenance des pays émergents, la volatilité des marchés, la baisse inexorable du nombre d'agriculteurs en Europe, le changement climatique et la raréfaction des ressources, l'érosion génétique etc. Autant de facteurs que la réforme dela PAC ne pourrait ignorer.
Pour lire la note en entier:
Pour la télécharger: 20120518_Réforme PAC_LK
Dernières évolutions de la réforme de la PAC - Mars 2013:
Depuis la publication des propositions de la Commission européenne en Octobre 2011, de nombreuses étapes ont été franchies. En particulier, le Parlement européen (PE), pour la première fois co-législateur en la matière, a amendé ces propositions législatives au sein de sa Commission parlementaire Agriculture et Développement Rural (23 janvier 2013), et une deuxième fois lors de la séance plénière du 13 mars 2013.
Malheureusement, et à la grande déception des Verts, le PE n'a pas été à l'hauteur des attentes des citoyens européens, et sa participation dans ce domaine n'amorcera pas la transition agro-écologique tant espérée.
Les Verts se seront pourtant battus jusqu'au bout pour tenter d'inverser la tendance et de ré-introduire certains amendements perdus au fil des négociations en Commission parlementaire Agriculture et Développement Rural.
En particulier:
- La tentative de réduire le plafonnement des aides de 300 000 à 100 000 a échoué. Ce plafonnement ne permettra en aucun cas une redistribution plus équitable des aides. En Belgique, un plafond à 300 000 ne touchera que 46 exploitations (sur 48 000!)
- Les propositions de Verdissement n'ont pas été sensiblement améliorées par rapport au vote en Commission. Heureusement la proposition du PPE de réduire le verdissement à un "menu optionnel" pour chaque Etat Membre a été rejetée. Après plus de 6 mois de négociations, le PE a finalement décidé de maintenir le principe d'un verdissement "obligatoire".
- Malheureusement les mesures à l'intérieur de ce verdissement ont été affaiblies par rapport aux propositions initiales de la Commission. Par exemple, à la place d'une vértiable mesure de "rotation des cultures", on ne retrouve qu'une fade "diversification des cultures" qui n'atteindra pas de tout les mêmes objectifs. Autre exemple: la Commission proposait à l'origine de condtionner l'octroi des aides à une zone d'intérêt écologique de 7% (/ superficie exploitation totale). Le Parlement a réduit cette mesure à 3% (avec possibilités d'augmentation par la suite)
- Au niveau du développement rural, les Verts essuyent une perte majeure d'un point de vue budgétaire. Ils ne sont pas parvenus à empêcher les transfers de fonds du pillier 2 (développement rural, déjà complètement sous-financé par rapport aux paiements directs) vers le pillier 1 (paiments directs). Quelques points positifs (mais assez techniques) sont néanmoins à relever à l'intérieur du pilier 2 et la possibilité d'un "double financement" a été éliminée(le vote en Comagri laissait la porte ouverte à un double paiement pour la même mesure).
- Les mesures de marché: les subventions aux exportations restent dans le dispositif PAC (dont impact est catastrophique sur les pays du Sud). Au niveau du positif, certaines mesures prévoient néanmoins un soutien renforcé aux organisations inter-professionnelles et aux organisations de producteurs. Mais les Verts ont néanmoins rejeté le mandat général (trop faible sur ce volet).
- Un point positif transversal: le vote en plénière a permis de ré-introduire la mesure transparence sur la distribution des paiements directs (combien d'argent? Versé à qui?) qui avait été rejetée en Commission agriculture.