Finances: les Verts veulent favoriser les banques classiques et modérer les salaires
Article de Pierre-Henri Thomas paru dans Le Soir (23 mars 2012)
Le sujet n’est peut-être pas glamour, mais il est important ». Le député européen Philippe Lamberts (groupe Les Verts) est conscient qu’il est difficile d’intéresser les gens à la transposition en droit européen des règles de Bâle III, qui doivent renforcer le capital des banques. Le processus législatif s’étire : c’est en juillet 2010 que la Commission européenne a remis son projet de directive, qui est aujourd’hui débattu au Parlement européen. Ensuite, il devra, avant d’aboutir, effectuer de nombreuses navettes entre le Parlement et le Conseil des ministres.
Pourtant, on le voit avec Dexia, il est en effet crucial de légiférer pour poser des garde-fous. « Le problème de Bâle III, explique Philippe Lamberts, est que c’est une “taille unique”, qui vaut tant pour les petites banques fondamentales qui ne font que récolter des dépôts, que pour les institutions systémiques, qui ont d’importantes activités spéculatives. Les Etats-Unis, ajoute le député, ont dit que ces règles ne vaudraient que pour leur quinzaine d’établissements systémiques. Mais l’Europe, elle, veut les appliquer à tous ».
Il faudrait donc revoir les tailles. « Les banques systémiques, qui prennent des risques spéculatifs afin de soutenir leur rentabilité à court terme, doivent être soumises à un ratio de capital plus élevé », dit Olivier Marquet, le patron de la Banque Triodos Belgique qui soutient les amendements des Verts européens
Les Verts proposent de diviser la famille bancaire en trois. Un, les banques fondamentales (qui ont un modèle sain : elles récoltent les dépôts d’un côté, octroient des crédits de l’autre). Deux, les banques systémiques (les institutions trop grandes pour qu’on les laisse tomber et qui ont des activités spéculatives). Trois, les banques universelles, moins grandes, mais qui spéculent elles aussi pour compte propre.
Les Verts, mais aussi les banques classiques comme la banque Van Breda ou Triodos, sont en faveur de l’instauration d’un ratio de solvabilité simple, dit « ratio de levier », qui exige simplement que les fonds propres s’élèvent à un certain pourcentage de ses actifs, quels qu’ils soient (crédits aux entreprises, obligations d’Etat, etc.). Actuellement, les banques peuvent mobiliser moins de fonds propres parce qu’elle pondère ces actifs qui entrent dans le calcul du capital qui leur est demandé en fonction de la nature de ces engagements (une obligation d’Etat demande moins de fonds propres qu’un crédit aux entreprises). Les grandes banques disposent de leurs propres modèles de pondération, évidemment avantageux.
Les Verts proposent donc d’instaurer un ratio de levier minimum de 3 % pour les banques fondamentales, de 6 % pour les banques universelles et de 9 % pour les banques systémiques. Ce qui devrait être dur à avaler pour ces dernières, dont le ratio de levier tourne aujourd’hui plutôt autour de 3 %. Philipe Lamberts ne cache pas l’objectif : il veut, en les forçant à réduire leurs bilans ou à scinder leurs activités, la disparition des banques systémiques, qui font prendre d’énormes risques à la collectivité.
L’autre volet de la proposition des Verts touche aux rémunérations. L’objectif consiste à instaurer au sein des banques un écart maximal de 1 à 40, entre le plus petit et le plus haut salaire. C’est beaucoup ? Certes, dans une banque comme Triodos, l’écart va de 1 à 10. Mais dans d’autres institutions, il est de 1 à 400.