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L'Europe doit soutenir la taxe Biden sur les multinationales !

13/05/2021
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La guerre fiscale que se mènent les États membres est l’un des plus grands maux de l’Union européenne. Elle engendre chaque année des pertes fiscales colossales qui mettent en péril le financement de nos services publics : soins de santé, écoles, institutions culturelles, etc.
Pourquoi alors rien ne change ? La faute à la règle de l’unanimité pour les décisions en matière fiscale dans l'UE. Celle-ci permet aux paradis fiscaux européens - en particulier l’Irlande, les Pays-Bas et le Luxembourg - de bloquer systématiquement tout véritable progrès en la matière.

Pour contourner la règle de l’unanimité, la Commission a adopté une stratégie alternative : régler les abus fiscaux via la politique de concurrence, dont elle a la compétence exclusive. Concrètement, l’idée est d’utiliser les règles en matière d'aides d'État pour lutter contre la concurrence fiscale déloyale au sein de l’UE.

À l’issue de plusieurs enquêtes menées de front à partir de 2013, la Commission a conclu que les avantages fiscaux sélectifs octroyés par le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Irlande et la Belgique à un certain nombre de multinationales étaient illégaux au regard des règles en matière d'aides d'État. Conséquence : ces pays ont été sommés de récupérer les milliards d’impôts impayés par les sociétés concernées.

Déterminés à ne pas récupérer l'argent, le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Irlande et la Belgique ont introduit des recours en annulation devant le Tribunal de l'Union européenne (TUE). Jusqu’il y a peu, le TUE avait annulé trois décisions de la Commission (les arrêts Starbucks, Apple, et « excess profit rulings »), ne lui donnant raison qu’à une seule reprise (l’arrêt Fiat Chrysler). Bref, un bilan très négatif pour la Commission dans sa lutte pour la justice fiscale.

Allait-elle être à nouveau désavouée ce mercredi, alors que le Tribunal de l’UE devait cette fois se prononcer sur les rabais fiscaux octroyés par le Luxembourg à Amazon et Engie ? Partiellement.

Si les juges européens ont confirmé hier la décision de la Commission de sanctionner le groupe énergétique français pour traitement fiscal préférentiel au Luxembourg, ils ont par contre annulé celle concernant Amazon.

Les résultats décevants du combat mené par la Commission contre l'évasion fiscale des multinationales démontrent les limites de la stratégie privilégiée : les règles de l'UE en matière d'aides d'Etat ne sont pas la solution pour surmonter ce problème.

Le salut pourrait cependant venir de l’extérieur de l’Union. Aux Etats-Unis, le Président Joe Biden défend actuellement l’instauration d’un taux minimum d’imposition des multinationales de 21% au niveau mondial. L’idée est simple : si une entreprise bénéficie de taux inférieurs dans une juridiction, son pays d’origine pourrait taxer la différence.

Certes, de nombreuses questions subsistent à propos des modalités d’application de cette taxe mondiale : quelles entreprises seraient concernées ? Quelle serait la base taxable (i.e. la part des profits visés par la taxation) ? Ou encore, à qui l’imposition profiterait-elle le plus ?

Selon la méthodologie choisie, les gains de recettes fiscales escomptés pour les Etats européens pourraient varier fortement.
L’Europe aurait donc grand tort de rester en dehors de ce débat crucial. Elle se doit de définir une position cohérente et ambitieuse en vue de la réunion du G20 Finances les 9 et 10 juillet prochains, où un accord sur la taxation des multinationales sera négocié.

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Philippe

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