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Ceci n'est pas un paradis fiscal

08/02/2019
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C'est une petite phrase qui n'est pas passée inaperçue, dans le rapport final de la commission parlementaire TAX3 qui enquêtait sur la criminalité financière, la fraude fiscale et l'évasion fiscale dans l'Union européenne. Une petite phrase dans laquelle le Parlement européen "souligne que les hauts niveaux d'investissement direct étrangers (flux entrants et sortants) en pourcentage du PIB dans sept États membres (Belgique, Chypre, Hongrie, Irlande, Luxembourg, Malte et Pays-Bas) ne s'expliquent qu'en partie par les activités économiques réelles conduits sur le territoire de ces États". Une petite phrase qui, en d'autres mots, qualifie la Belgique, aux côtés de 6 autres pays européens, de paradis fiscal. Bon, ce n'est pas comme si nous l'avions découvert hier : cela fait bien longtemps que les écologistes dénoncent à tous les niveaux la concurrence fiscale que se livrent les États membres en général, et le régime belge en particulier qui transforme notre pays en paradis fiscal des grandes entreprises. On sait que la Belgique est l'un des pays qui perd le plus à cause de l'optimisation fiscale. Pensons à l'exonération des bénéfices excédentaires octroyée à des sociétés multinationales, les fameux "excess profit rulings" pour lequel la Commission européenne avait condamné la Belgique à récupérer près d'un milliard d'euros en impôts non perçus ! Le rapport TAX3, donc, a été adopté hier par les eurodéputés de cette commission, et sera soumis au vote de la plénière fin mars. Je ne peux que me réjouir que, quatre ans après la création de la première commission spéciale (LUXLEAKS), nos demandes soient de plus en plus partagées au sein du Parlement. Le rapport demande entre autres à la Commission européenne de proposer des modifications de la législation actuelle qui permettraient d'interdire les sociétés boîtes aux lettres. Reste cependant à faire bouger les lignes au sein du Conseil pour que notre victoire des idées se traduise en victoires concrètes. Le rapport pointe en effet le manque évident de volonté politique de la part des États membres de l'UE, et du Conseil. Malgré la multiplication des scandales et le sentiment grandissant d'injustice fiscale, les gouvernements des États membres continuent de bloquer les indispensables réformes pour mieux lutter contre l'évasion et la fraude fiscales et le blanchiment d'argent. Les solutions à mettre en place sont sur la table : c'est notamment le reporting pays par pays, c'est à dire l'obligation pour les grandes entreprises de rendre publiques des informations comptables précises concernant leurs activités, notamment le chiffre d'affaires, le profit, le nombre d'employés et les impôts payés, et ce dans chaque territoire où elles sont implantées. Ceci permettrait de s'assurer que les impôts versés correspondent à la réalité de l'activité économique et permettrait de détecter les déplacements artificiels de bénéfices. Mon collègues Georges Gilkinet a d'ailleurs déposé une proposition de loi à ce propos à la Chambre des représentants en 2016. Une autre mesure urgente est de se mettre d'accord sur un taux d'imposition minimum pour mettre fin à la course au moins-disant en matière de fiscalité – les libéraux et les conservateurs ont, hélas mais sans grande surprise, empêché que cette demande figure clairement dans le rapport. La justice fiscale sera un des enjeux majeurs des élections européennes et fédérales de mai prochain. Inutile de préciser que les Verts en ont fait une des priorités de leur campagne ☺️

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